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24 - 34 minutes de temps de lectureMode de lectureUn monde d’écart

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  1. Chapitre n°1
  2. Chapitre n°2
  3. Chapitre n°3
  4. Chapitre n°4

Chapitre n° 1

Le jour où ma vie a basculé

 

J’avais tout pour être heureuse : un fiancé que j’aimais, des parents riches qui acceptaient de tout m’offrir, même un mariage grandiose. Être fille unique avec des parents fortunés a ses avantages, mais aussi ses inconvénients. Je rêvais d’être comédienne, mais Béatrice et Mike, mes parents, voulaient que je prenne la succession de l’hôtel qu’ils tenaient ensemble. Autant vous dire que c’était un sujet de dispute.

Le jour où je leur ai présenté Lassana, ils l’ont tout de suite adopté. Il faut dire aussi qu’il est de notre milieu. Nous nous sommes rencontrés alors qu’il passait une semaine à l’hôtel, puis un mois après, il demandait ma main à mes parents et trois mois plus tard, nous allions nous marier. Je le serais si une certaine Mariama Abara n’était pas entrée dans la pièce où je me préparais pour le plus beau jour de ma vie. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai tout de suite senti qu’il se passait quelque chose. Sans plus attendre, j’ai demandé à ma mère puis à mes amies de nous laisser.

Quand nous nous sommes retrouvées seules, elle m’a regardée de haut en bas. Bien sûr, j’ai fait la même chose. Pendant de longues minutes, elle m’a fixée puis elle a fini par lâcher une bombe.

— Vous ne devez pas vous marier avec Lassana, c’est un menteur.

— De quel droit vous venez jusqu’ici pour me dire ça ! m’exclamé-je.

— Je suis sa compagne officielle. On est ensemble depuis deux ans.

— C’est impossible, je l’ai connu il y a 5 mois. Il m’a toujours dit qu’il était célibataire.

— C’est ce qu’il dit à toutes les femmes qu’il rencontre. Je vous demande seulement de m’écouter. Ce sera à vous de décider ce que vous voulez faire après. Sachez que j’arrive directement de l’aéroport. Je viens de Tunisie.

— Je vous laisse cinq minutes, dis-je après une hésitation.

— Ça sera largement assez.

C’est à partir de ce moment que ma vie s’est écroulée.

— Lassana ne vous aime pas, il vous utilise pour obtenir ses papiers français. Dès qu’il les aura, il demandera le divorce. Il m’a promis de me faire venir en France après. Grâce au mariage, il sait qu’on gagnerait du temps, débute-t-elle.

— Si je ne me trompe pas, il faut quand même être bien intégré puis être marié depuis plusieurs années pour demander la nationalité française.

— Il s’est renseigné. Il est prêt à rester avec vous jusqu’au jour où il aura ses papiers. Comme je savais que vous ne me croiriez pas, j’ai emmené ceci.

Elle m’a tendu une photo. Quand je l’ai prise, j’ai vu Lassana et elle en train de s’enlacer puis de s’embrasser. Toute tremblante, j’ai laissé tomber la photo au sol. À première vue, c’était une photo toute récente. J’ai reconnu le costume que Lassana portait le jour où il a demandé ma main.

— Ce jour-là, il m’a dit qu’il devait aller en urgence voir des personnes pour un poste en France, m’annonce-t-elle.

— Tout ça, c’est faux ! m’écrié-je.

— Réfléchissez bien. Est-ce qu’il est toujours avec vous ou trouve-t-il toujours des excuses pour ses longues absences ?

Pendant quelques minutes, j’ai essayé de me souvenir des moments où Lassana n’était pas là. Je dois avouer qu’elle avait raison.

— Est-ce que vous êtes au courant depuis toujours de ma relation avec lui ? l’interrogé-je.

— Non, ça fait seulement quelques jours. J’ai longtemps hésité à venir vous voir. Je me suis même dit que je pouvais vous écrire, car je veux vivre en France.

— Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?

— Savoir par quel moyen je serais en France me met en colère. Je ne veux pas qu’une femme soit utilisée pour mon propre bonheur. Bien sûr, c’est à vous de décider de ce que vous voulez faire. Si vous pensez que je vous mens, vous pouvez aller lui demander s’il connaît une certaine Mariama Abara, mais il va vous mentir sans aucun doute. Les cinq minutes sont écoulées. Je vous laisse mon numéro, si vous voulez avoir des renseignements sur Lassana.

Elle a posé un morceau de papier sur la petite table puis elle est sortie.

À peine était-elle partie que j’ai senti mes larmes couler. Dans un état second, j’ai retiré ma robe, puis j’ai remis mes vêtements de ville et je suis partie sans laisser de mot ni me retourner.

Ma meilleure amie qui était dehors en train de fumer m’a vue.

— Eh ! Mais pourquoi as-tu retiré ta robe ? me demande-t-elle interloquée.

— Emmène-moi loin d’ici, lui ai-je répondu au bord des larmes.

Sans poser d’autres questions, elle a compris qu’il se passait quelque chose de grave et que c’était lié à la visite de la femme.

— Tu veux aller où ?

— Dépose-moi à la gare, s’il te plaît.

— Sabine, dis-moi ce qu’il se passe ?

— Je te promets que je t’expliquerai tout, mais là j’ai besoin de m’éloigner d’ici.

Pendant le trajet, mon portable n’avait pas arrêté de sonner. C’étaient mes parents, mais je ne leur ai pas répondu.

Quand mon amie m’a déposée à la gare, elle m’a rappelé qu’elle était là si jamais j’avais besoin.

Je suis rentrée dans la gare avec l’esprit vidé, sans me retourner. Au guichet, je ne savais pas où j’allais. Tout ce que je voulais, c’était mettre de la distance avec Lassana et ma famille. Alors que j’attendais mon tour, j’ai vu une pub sur Brest. Sur un coup de tête, j’ai pris un aller simple pour cette ville. Ici, quand nous parlons de Brest, nous disons que c’est le bout du bout !

À mon arrivée, j’ai trouvé une place dans une auberge de jeunesse. La première chose que j’ai faite, c’est de me trouver un emploi. J’ai pris le premier qui venait, c’est-à-dire serveuse dans un bar au bord de la mer. Après ça, j’ai loué un appartement meublé avec deux grandes chambres, une cuisine, un petit salon et une salle de bains. Bon, ce n’est pas un penthouse, mais ça me suffit. Bien sûr, j’ai dû prévenir mes parents pour qu’ils acceptent d’être garants. J’en ai profité pour leur raconter toute l’histoire. Alors que je pensais qu’ils allaient me croire, c’est tout le contraire qui est arrivé. Ils ont refusé d’être mes garants en me demandant de revenir pour me marier comme c’était prévu. Depuis ce jour, je ne leur ai plus répondu. Pour l’appartement, j’ai trouvé une solution, une amie serveuse qui s’appelle Marion est venue habiter avec moi, car elle devait changer de maison. Ses parents se sont portés garants pour nous et m’ont bien sauvé la mise !

Un mois plus tard, j’ai envoyé un message à Lassana pour lui dire que je voulais entendre sa version.

 

 

Chapitre n° 2

Rencontre dans un bar

 

Aujourd’hui, si je suis devant le bar le Coloc’ où je travaille depuis maintenant trois semaines, c’est parce que j’ai donné rendez-vous à Lassana. J’aurais pu rentrer à Paris, mais j’ai préféré le voir à Brest dans un lieu sûr pour moi, un lieu neutre en quelque sorte. J’aurais pu le retrouver à la gare, mais je ne préfère pas.

— Sabine, tu dois vraiment aimer le bar pour être là même le jour de ton repos, me dit Marion.

— Arrête, tu sais très bien que j’ai donné rendez-vous à quelqu’un. Et puis comme je ne connais pas encore bien la ville, j’ai préféré venir ici.

— Un rendez-vous galant, petite cachottière ? me taquine Marion.

— Non, je t’ai déjà parlé de mon ex.

— Oui, celui avec qui tu as failli te marier ? Mais tu ne m’as pas tout dit.

— C’est ça. Ça fait un mois. Je me sens prête à entendre sa version. Je te promets que tu sauras tout après.

— Je vois. Installe-toi où tu veux. Est-ce que tu veux quelque chose à boire en l’attendant ?

— Donne-moi une limonade, il vaut mieux que je garde les idées claires.

— Je vais te chercher ça.

Marion me laisse alors que je choisis une table sur la terrasse. Au bout de quelques secondes, Marion revient avec mon verre.

— Je viens de penser que je vais voir pour la première fois celui qui te fait pleurer toutes les nuits.

— C’est faux !

— Je te rappelle qu’on vit ensemble et que nos chambres se touchent, et que les murs ne sont pas épais.

Elle a raison, ça fait un mois que je n’arrête pas de pleurer sur ma vie.

— Tu me diras ce que tu en penses.

— Avec plaisir. Bon, je te laisse. Il faut que je bosse.

En effet, même si nous sommes seulement en début d’après-midi, il y a du monde. Juste à côté de moi, il y a un homme qui, je dirais, a un peu plus de 35 ans. Il boit un café. Il a l’air sympa.

Pendant de longues minutes, je reste cependant plongée dans mes pensées. C’est la voix de Lassana qui me fait revenir à la réalité.

— Je ne m’excuserai pas pour le retard, dit-il !

— Bonjour quand même. Comment vas-tu ? lui demandé-je par politesse.

— Si je suis venu jusqu’ici, c’est pour te ramener à Paris ! crie Lassana.

Bon d’accord, il est franchement énervé, mais quand même, il pourrait dire bonjour, ça fait un mois qu’on ne s’est pas vu.

— Tu peux t’asseoir, tu ne paieras pas plus cher.

— Non ! Tu n’as pas entendu ce que j’ai dit ?

— Si et ma réponse est non. Je ne rentrerai pas à Paris.

— J’ai ordre de tes parents de te ramener. Tu dois arrêter tes caprices !

— Ce n’est pas un caprice. J’ai appris que tu me trompais, que tu m’utilisais pour avoir tes papiers français.

— Mais c’est totalement faux ! Qui t’a dit ça ?

— Une certaine Mariama Abara.

D’un coup, je le vois s’asseoir, puis il fait signe à Marion. Quand elle arrive à notre table, je remarque qu’elle me regarde et qu’elle aimerait que je lui explique ce qu’il se passe, mais en tant que professionnelle, elle ne dit rien.

— Que puis-je vous servir, monsieur ? demande-t-elle à Lassana.

— Une pression, s’il vous plaît.

— Une autre limonade, dis-je.

Dès qu’elle a noté notre commande, elle part. Pendant que nous attendons nos boissons, nous ne parlons pas. J’en profite pour regarder Lassana. J’ai l’impression qu’il a vu un fantôme. Marion revient avec nos boissons.

— Merci, lui dis-je tandis que Lassana reste silencieux.

Elle repart.

— J’ai l’impression que tu connais cette Mariama.

— Ce n’est pas ce que tu crois.

— Et qu’est-ce que je crois ?

— Que j’ai une aventure avec elle.

— Ah parce que ce n’est pas le cas ?

— J’ai eu une relation avec elle, mais au bout d’un an, j’ai rompu. Elle n’a jamais accepté. Tu n’es pas la première à qui elle fait le coup. À chaque fois, elle va voir mes nouvelles copines. Je ne sais même pas comment elle fait pour avoir leur prénom. Je te l’ai dit, j’ai un passé sentimental. Après ma rupture, je suis resté célibataire quelque temps et j’ai enchaîné les aventures d’une nuit.

— Stop, tu as dit qu’elle allait voir toutes tes nouvelles copines. Est-ce que c’était le jour de ton mariage ?

Il tourne la tête sans me répondre.

— Merde ! Réponds-moi !

— Oui.

— Combien de fois ?

— Quatre fois si je te compte.

— Donc si je comprends bien, ce n’est pas la première fois que tu utilises une femme pour avoir tes papiers ?

— Sabine, je te promets qu’avec toi, c’est différent. Je veux vraiment faire ma vie avec toi et fonder une famille.

— Qu’est-ce que tu fais de Mariama ?

— Je te l’ai dit, c’est fini avec elle depuis 5 ans.

— J’ai du mal à te croire.

— Tu ne vas pas la croire elle, alors que tu ne la connais pas. De toute façon, tes parents veulent que tu rentres avec moi. Ils m’ont dit que tu dois arrêter de te comporter comme une enfant.

— Je t’ai dit non. Tu diras à mes parents que je ne veux plus les voir et que ce n’est pas la peine de me téléphoner non plus.

— Ta mère pleure depuis ton départ. Ton père ne gère plus son hôtel, car il s’inquiète pour toi. Ce n’est pas négociable, tu rentres avec moi et on se marie comme c’était prévu il y a un mois. À l’heure qu’il est, on aurait dû être en lune de miel. Je nous avais réservé un hôtel à l’île de la Martinique !

— En quelle langue je dois te le dire ? Je ne retournerai pas à Paris ! m’exclamé-je.

— Je ne partirai pas de cette ville sans toi ! Rien ne te retient ici.

— Tu peux toujours attendre, je ne reviendrai pas. Je veux pouvoir vivre pour moi.

— Tu n’as même pas d’endroit où dormir. Tu ne sais rien faire de tes mains. Ah si ! Pardon, tu veux être comédienne, laisse-moi rire, dit-il en se levant.

Lassana part comme il est arrivé. Je sens mes larmes commencer à couler. Je décide d’aller payer mes deux verres de limonade, puis de rentrer et de me lamenter sur ma vie.

Au moment où je me lève, mes jambes se mettent à trembler. Je sens que je vais tomber, mais deux bras musclés me retiennent.

En tournant la tête, je croise des yeux marron.

— Rasseyez-vous quelques minutes, dit la personne qui vient de me sauver.

Il a une voix grave et sexy. Il m’aide à m’asseoir puis je le vois faire la même chose juste en face.

Pendant de longues minutes, nous ne parlons pas. C’est lui qui rompt le silence. Quand il voit que j’ai repris des couleurs, il me demande :

— Est-ce que vous voulez que j’aille vous commander quelque chose, vous êtes très pâle ?

— Non, merci. Ça va aller.

Du coin de l’œil, je vois Marion m’observer de loin. Je lui fais signe que je lui parlerai plus tard.

— Si ce n’est pas indiscret, est-ce que vous connaissez l’homme qui était avec vous ?

— Oui. Du moins, je pensais le connaître. Je ne veux pas en parler, surtout pas à un inconnu, même s’il est sexy.

Le silence s’abat entre nous encore une fois. Je n’y crois pas. Je viens de dire qu’il était sexy alors que c’est la première fois que je le vois.

— Vous savez, ça vous ferait peut-être du bien d’en parler. Je n’ai pas entendu votre conversation, mais il avait l’air d’être énervé contre vous.

— Vous avez sûrement raison, mais je ne veux pas vous déranger avec ma vie. De plus, vous avez certainement autre chose à faire.

— J’ai tout mon temps.

Après avoir hésité quelques secondes, je me lance. Cet homme a l’air de confiance et sa bonne tête me plaît bien.

— Le jour de mon mariage, j’ai appris que mon fiancé me mentait et qu’il m’utilisait pour avoir ses papiers français. C’est sa compagne officielle qui me l’a avoué.

— Ça a dû être dur. Je ne savais pas qu’il existait encore des gens qui profitent des femmes juste pour ça. Comment vos proches ont réagi ?

— Pour eux, je dois me marier. Je suis partie de la cérémonie sans leur laisser un mot. J’ai quitté Paris pour venir à Brest sur un coup de tête.

— Eh bien, je vous trouve courageuse de revoir celui qui vous a menti.

— Il m’a fallu un mois. Je voulais entendre sa version. Il est venu pour me ramener et il croit que je veux toujours me marier. Je ne sais pas pourquoi je vous raconte tout ça. Ma nouvelle amie connaît les grandes lignes.

— Comme je vous l’ai dit, ça fait du bien de parler à quelqu’un qui ne vous connaît pas. Si vous voulez, je vous donne mon prénom volontiers, mais je ne veux plus voir ces larmes sur ce beau visage.

Je m’essuie avec ma main.

— C’est mieux. Je m’appelle Claude.

— Enchantée, Claude. Moi, c’est Sabine.

— De même. C’est un très joli prénom, comme la femme qui le porte.

— Merci, murmuré-je en rougissant.

Il doit penser que je n’ai jamais eu de compliments. En même temps, c’est vrai. Lassana ne m’en faisait jamais et mes parents non plus.

— Est-ce que vous me permettez de vous inviter à boire un verre ? Je vous rassure, je ne vous drague pas. C’est pour discuter et vous changer les idées.

Je ne risque rien d’accepter.

Je réfléchis avant de répondre.

— Avec plaisir.

Il fait signe à Marion qui vient immédiatement.

— Que puis-je vous servir ?

— Je prendrai une pression, s’il vous plaît, dit Claude.

— Une bière blanche, s’il te plaît, lui répondis-je.

Elle part, non sans me regarder.

— Vous venez souvent ici ?

— À vrai dire, je travaille ici. Aujourd’hui, c’est mon jour de repos.

— Je comprends mieux pourquoi la serveuse ne vous quitte pas des yeux.

Marion revient avec nos consommations.

Claude et moi parlons pendant environ deux heures. Je ne sais pas comment il le fait, mais il me fait oublier ma vie qui est un désastre. En plus, il arrive à me faire rire, chose qui ne m’était plus arrivé depuis bien longtemps.

Quand je regarde l’heure, je m’aperçois qu’il est déjà 22 heures.

— Je dois y aller, dis-je en voyant que toutes les tables ont été rangées et qu’il n’y a plus personne autour de nous.

— Bien sûr. Je peux vous reconduire chez vous, si vous voulez.

— J’ai vraiment passé une très bonne soirée, mais je dois refuser votre proposition.

— Je comprends, même si j’aurais aimé passer plus de temps avec vous.

Je le vois prendre une feuille puis écrire quelque chose dessus. Il me la tend.

— C’est mon numéro de téléphone personnel. Appelez-moi si vous avez besoin de parler ou pour autre chose.

Je le remercie puis nous disons au revoir.

— Je préfère le deuxième, me dit Marion quand j’arrive près d’elle. D’où tu le connais ?

— Je viens de faire sa connaissance au bar.

— Si tu veux mon avis, tu devrais foncer.

— Je ne suis pas prête pour une nouvelle relation.

— Passer une nuit avec lui doit être merveilleux !

— Pas pour moi.

— Rassure-moi, tu as déjà couché avec un homme, j’espère ?

— Non. Je préfère attendre le bon.

— Même pas avec ton ex ?

— Il voulait attendre qu’on soit mariés pour le faire.

— Je sais qu’on ne se connaît pas depuis longtemps et que tu ne m’as pas tout raconté toute l’histoire avec ton ex, mais tu devrais vivre ta vie.

— Je dois régler l’histoire avec Lassana. J’ai l’impression qu’il ne va pas me lâcher si facilement. Il est toujours en ville.

Tout en parlant, nous rentrons à pied jusque chez nous.

Chapitre n° 3

Lassana se montre menaçant

 

Le lendemain, alors que je suis encore dans ma chambre, on sonne à la porte. Quelques minutes plus tard, Marion entre dans ma chambre.

— C’était qui ?

— Le livreur.

— Je n’ai rien commandé.

— Moi non plus, mais quelqu’un a un admirateur secret. Tiens ! c’est pour toi.

Elle me tend un bouquet de fleurs.

— Tu es sûre que c’est pour moi ?

— Oui, il y a un mot à ton nom.

Je prends le petit papier et je le lis : « Pour la plus belle femme que j’ai rencontrée. Claude. »

— Eh ! Tu lui as tapé dans l’œil. Sabine, qu’est-ce qu’il se passe ? me demande-t-elle en voyant mon visage devenir pâle.

— Je ne lui ai même pas donné notre adresse.

— Quoi ? Et il l’a eue comment alors ?

— Je n’en sais rien. Peut-être qu’il nous a suivies hier soir.

— C’est peut-être un fou ou un détraqué.

— Tu vois le mal partout.

— Est-ce que je peux te poser une question ?

— Bien sûr.

— C’est par rapport à ton ex. Tu m’as dit qu’il t’avait trompée, mais j’ai l’impression que ce n’est pas tout. Est-ce que j’ai raison ?

— En effet, mais on n’a pas le temps pour en discuter si on ne veut pas être en retard, on doit partir maintenant.

— Tu ne t’en sortiras pas aussi facilement.

Je prends une grande inspiration puis lâche :

— Écoute, Lassana voulait m’utiliser pour avoir ses papiers français, c’est sa compagne officielle qui me l’a avoué le jour de notre mariage. Je te promets de t’en dire plus ce soir, lançai-je, résignée.

— Je vais m’en contenter pour l’instant.

— Ah quand même, je t’attends depuis près d’une heure ! s’exclame Lassana.

— Qu’est-ce que tu fais ici ?

— Je te l’ai dit hier, je ne rentrerai pas sans toi. Tes parents m’ont demandé de te ramener. Je t’ai suivie hier soir et j’ai vu où tu habites.

— Va leur dire que je suis bien ici et que je ne compte pas rentrer ! m’exclamé-je en continuant à marcher.

D’un coup, il m’attrape par le bras.

— Lâchez-la ! s’écrie Marion.

Je me détache non sans mal.

— Je ne vous connais pas, mais Sabine n’a pas envie de vous suivre !

— En effet, on ne se connaît pas, et ça ne vous regarde pas.

— Vous forcez mon amie à vous suivre, alors ça me regarde. Si vous ne partez pas tout de suite, j’appelle la police.

Au début, Lassana ne la croit pas, mais quand elle prend son portable, il s’enfuit.

— Merci, dis-je à Marion.

— C’est normal. Quand on attaque une de mes amies, je sors les crocs.

— J’ai vu ça.

— Dis, est-ce qu’il a déjà levé la main sur toi ?

— Non, c’est la première fois qu’il se montre aussi violent.

— Tu devrais peut-être téléphoner à tes parents pour les rassurer.

— Non ! Je ne veux plus avoir affaire à eux.

— Calme-toi, je le proposais seulement. Je ne comprends pas toute ton histoire, mais tu dois avoir tes raisons pour rejeter ta famille.

Les larmes aux yeux, je me tourne vers la mer.

— Sabine, je suis désolée. C’est mon plus gros défaut, je veux toujours tout savoir sur les gens que je connais. À chaque fois, j’oublie que je ne dois pas forcer les gens à parler s’ils ne le veulent pas.

— Ce n’est pas ta faute.

— Je te promets que je ne te poserai plus de questions sur ta vie. J’attendrai que tu sois prête.

— Merci, Marion.

— Juste une chose, tu devrais envoyer un message à Claude.

— Pour lui dire quoi ?

— Déjà le remercier pour son bouquet et je pense aussi que tu devrais lui laisser une chance. Si tu ne le fais pas, c’est moi qui le ferai à ta place. Allez, viens, il est temps qu’on parte pour le travail.

Pendant le trajet jusqu’au bar, je n’arrête pas de regarder derrière nous.

— Arrête, il n’y a personne. Ton ex est parti.

— Oui, mais Claude aussi connaissait notre adresse. C’est bizarre.

Après avoir essuyé mes larmes, nous nous changeons dans les vestiaires et commençons le boulot.

À ma pause de midi, je décide d’envoyer un message au fameux Claude.

« Bonjour, c’est Sabine. Je voulais juste

te remercier pour le bouquet que tu

m’as offert. J’aimerais savoir comment tu

as eu mon adresse ? »

Au moment où je remets mon portable dans mon casier, Marion me rejoint.

— Ah ! Tu es là.

— Oui, tu vas être contente, je viens d’envoyer un message à Claude. J’en ai profité pour lui demander comment il a eu notre adresse.

— Ça, c’est une bonne nouvelle. Mais il t’en aura fallu du temps.

— Je sais.

— En revanche, je suis venue te dire que ton ex est là. Comme il a demandé à boire, on ne peut pas le faire partir. Si tu veux, je peux dire au patron que tu te sens mal.

— Ce n’est pas la peine, ça ira.

— S’il tente quelque chose, tu me fais signe, me dit-elle alors qu’on arrive dans la salle.

— Je ne pense pas qu’il fasse quelque chose avec le monde qu’il y a.

Alors que l’après-midi est bien avancé, Lassana ne m’a toujours pas adressé la parole et vit sa vie comme si je n’existais pas. Soudain, j’aperçois un homme rentrer dans le bar. C’est Claude. Marion l’a aussi vu.

— Je te laisse aller le servir, me dit-elle alors qu’elle arrive au comptoir.

— Il s’est assis de ton côté.

— Eh bien, on fait un échange, tu ne perds rien. Au fait, ton ex est toujours là.

— Oui, je sais. Il prend son temps pour boire, on dirait.

— Tu vas voir, il va prendre ses jambes à son cou, je te le dis.

— Qu’est-ce que tu comptes faire ?

— Tu vas voir.

Pendant qu’elle attend sa commande, je vais prendre celle de Claude.

— Bonjour, Sabine.

— Salut, Claude. Tu vas bien ? Je te sers quoi ?

— Je prendrais une pression. Est-ce que tu as bien reçu mon bouquet de fleurs ?

— Oui, je t’ai envoyé un texto. Tu ne l’as pas reçu ?

— Si, si. Je veux te rassurer tout de suite, je ne vous ai pas suivies hier. Je suis détective privé.

D’un coup, nous entendons des voix.

— Monsieur, vous devez partir pour laisser la table libre, dit Marion à Lassana.

— Je ne partirai pas d’ici.

— Écoutez, ne m’obligez pas à appeler mon patron.

— J’ai le droit d’être là.

Alors que je vais chercher les commandes d’un couple et de Claude, je l’aperçois se lever et aller vers Marion et Lassana.

— La dame vous a dit de partir.

— Je vais y aller, mais j’ai quelque chose à faire avant.

Lassana se dirige droit vers moi.

— Sache que je reviendrai tous les jours jusqu’à ce que tu acceptes de revenir avec moi.

— Je ne changerai pas d’avis.

Au moment où je vois sa main se lever, un bras s’interpose.

— Oh non ! Pas question.

— Je vois que tu as des anges gardiens, mais ils ne seront pas toujours là, m’avertit Lassana avant de partir.

— C’est une menace ?

— Prends-le comme tu veux.

Marion, qui a suivi toute la scène, arrive.

— Est-ce qu’il t’a fait mal ?

— Non, Claude est intervenu à temps.

Je me retourne vers lui.

— Je dois encore te remercier.

— Ce n’est pas la peine. Je vais y aller.

— Mais vous n’avez même pas eu votre pression.

Claude me tend un billet.

— Je ne peux pas accepter. Je ne vous ai même pas servi.

Notre patron arrive enfin.

— Les filles, que se passe-t-il ici ?

— Ce monsieur n’a pas eu sa consommation, mais il veut quand même payer. Il est intervenu pour sauver Sabine.

Le patron regarde Claude avec des yeux ronds.

— Comment ça, sauver Sabine ? De quoi vous me parlez, les filles ?

Claude range son argent et profite de la confusion du patron qui nous harcèle de questions pour partir.

— Les filles, vous auriez dû venir me voir pour me dire qu’il y avait un client louche.

— Je le connais, monsieur. C’est mon ex. Je vous promets qu’il ne va plus revenir.

— Bon, je passe l’éponge pour cette fois-là, mais je ne veux pas de problème dans mon établissement. Allez, au boulot !

Le soir, en reprenant mes affaires dans mon casier, je remarque une lumière rouge qui clignote. Je me saisis de mon portable puis vois le nom de Claude s’afficher.

« Bonjour, merci pour ton numéro. J’espère te revoir dans d’autres circonstances. Claude. »

À peine dehors, je montre le message à Marion. Elle se met à sauter partout comme si c’était elle qui l’avait reçu.

— Dis-lui que tu acceptes.

— Je te l’ai dit que je n’étais pas intéressée. Mais si tu veux, je peux lui passer ton numéro.

— Ce n’est pas moi qui l’intéresse, mais toi. Crois-moi, il n’a pas hésité à venir te sauver quand ton ex allait lever la main sur toi.

— Je ne suis pas prête pour coucher avec un homme, surtout avec un inconnu.

— Eh ! Je ne te dis pas de faire l’amour avec lui, même si je pense qu’il sait y faire avec les femmes. Tu peux juste le voir pour parler, te balader.

— Je vais réfléchir.

— C’est déjà ça. Je n’ai pas oublié que tu m’as promis de me raconter ton histoire.

— Moi qui pensais que tu avais oublié, je me trompais. Je le ferai, mais pas ici.

— Alors, rentrons chez nous.

 

 

Chapitre n° 4

Mon histoire avec Lassana

 

Marion et moi sommes arrivées à notre appartement. Je fais tout pour retarder le moment où je vais devoir lui parler, mais elle ne me laisse pas le choix.

— Sabine !

— On ne peut pas remettre cette conversation à plus tard ?

— Non.

Je me laisse tomber sur le fauteuil.

— Est-ce que tu as quelque chose de fort ?

— Tu veux te soûler ?

— Non, mais on va en avoir besoin.

— C’est aussi horrible que ça ?

— Tu en jugeras par toi-même.

Marion va chercher deux verres avec une bouteille de vodka. Elle s’assoit en face de moi.

— Pour que tu comprennes tout, je dois t’avouer une chose que je ne t’ai pas dite quand on s’est connues.

— Je t’écoute.

— Mes parents sont millionnaires. Ils possèdent un hôtel à Paris. C’est le genre de lieu luxueux pour les célébrités qui viennent en vacances ou organisent des événements.

— Attends. Pourquoi tu as accepté de vivre dans cet appartement et de prendre un boulot de serveuse alors si tu es riche ?

— Parce que je veux vivre comme tout le monde. Ça n’a jamais plu à mes parents. Pour eux, ma vie est toute tracée. Quand ils prendront leur retraite, je dois reprendre l’hôtel, mais mon rêve c’est d’être comédienne.

— Je ne m’attendais pas à ça. Qu’est-ce que Lassana vient faire dans cette histoire ?

— Je l’ai connu il y a cinq mois. Il était en vacances dans l’hôtel. J’ai eu tout de suite un coup de foudre pour lui. Après cette semaine-là, on s’est vus plusieurs fois. Un mois après notre rencontre, il a demandé ma main à mes parents qui ont accepté immédiatement.

— C’est un peu vieux jeu, non ? Après tout, tu es majeure. Lassana n’a pas à demander à qui que ce soit.

— Non. Lassana vient d’une famille haute placée en Tunisie. C’est classique dans ces familles. On respecte les traditions. Mais ce n’est pas ça le problème. Pour moi, c’était trop tôt. Je me suis dit que le mariage aurait lieu dans un an, mais mes parents ont décidé de le préparer en trois mois. Pendant ce laps de temps, je n’ai pas vu souvent Lassana. Il faisait des allers-retours entre la France et la Tunisie. Pour tout le monde, c’était logique qu’il aille voir sa famille. Quelques jours avant le mariage, Lassana est revenu après une absence de quinze jours. Tout était prêt.

— Tu n’avais pas d’amis à ce moment-là ?

— Si, plein, mais ils ne m’écoutaient pas. J’ai eu beau leur dire que c’était trop rapide, mais vu que la plupart sont déjà mariés, ils pensaient que je stressais.

— Est-ce que Lassana sait que tu es vierge ?

— Oui. Il trouvait ça génial d’être le premier.

— Rassure-moi, vous avez quand même fait certaines choses ?

— Je l’ai embrassé, mais à chaque fois qu’il voulait aller plus loin, je le repoussais.

— Mais tu l’aimais ?

— Bien sûr.

— Qu’est-ce qu’il s’est passé pour que le mariage n’ait pas lieu, alors ?

Je lui raconte la venue de Mariama.

— J’étais en train de me préparer puis une femme est entrée dans la pièce. Tout le monde est parti. Elle s’appelle Mariama Abara. Elle m’a avoué être la compagne de Lassana depuis deux ans, puis tout ce qu’il voulait, c’était ses papiers français et la faire venir en France.

— C’est peut-être faux.

— C’est ce que j’ai pensé, mais elle m’a montré une photo d’eux. Crois-moi, Lassana portait le même costume en revenant en France. Sur la photo, ils s’embrassaient.

— Je ne comprends pas. Qu’est-ce qu’elle gagne en te le disant ?

— Rien, elle m’a dit que la balle était dans mon camp. Comme tu peux voir, j’ai décidé de ne pas me marier.

— Ça, je l’avais compris. Comment tes parents ont réagi quand tu leur as dit que tu annulais le mariage ?

— Je ne leur ai rien dit, du moins, pas le jour même. Il m’a fallu quelques jours pour leur téléphoner et m’expliquer. Leur réaction n’est pas celle que je pensais. Ils veulent que je rentre et que je me marie avec Lassana.

— Ils sont cons, désolée.

— Pas de souci.

— Est-ce qu’ils savent que tu es encore vierge ?

— Bien sûr. Pour eux, je dois le rester jusqu’à ma nuit de noces.

— Donc, ce n’est pas par choix que tu ne fais rien avec les hommes.

— Je ne sais pas si c’est ça, mais je veux être sûre de moi avant et ne pas le regretter après.

— Je comprends mieux maintenant ta réaction en voyant ton ex.

— Mes parents lui ont demandé de me ramener à Paris.

— Qu’est-ce que tu vas faire ?

— Rien, je lui ai dit que je ne rentrais pas avec lui. Je ne suis pas prête à leur pardonner.

— C’est compréhensible.

— Marion, je ne veux pas que tout le monde sache que je suis riche.

— Tu peux compter sur moi. Je ne le dirai à personne.

— Merci.

Marion nous sert la vodka.

— Tiens, me dit-elle en me tendant un verre. Tu avais raison, j’ai besoin d’alcool fort.

— Marion, est-ce que c’est pour cette raison que tu refuses de voir ce Claude ?

— Quelle raison ?

— Le fait que tu sois riche et que lui non. Et aussi que tu n’as jamais couché avec un homme.

— Je ne sais pas trop. Peut-être qu’au fond de moi, j’ai envie de faire plaisir à mes parents et d’attendre la nuit de noces.

— Je vais te dire une chose. Ce n’est pas à tes parents de choisir avec qui tu vas passer ta vie et encore moins avec qui tu vas coucher. On n’a qu’une seule vie. Dis-moi la vérité, est-ce que Claude te plaît ?

— J’avoue que je le trouve sexy. C’est un garçon drôle et sympathique.

— Eh bien, fonce !

— Mais s’il veut simplement faire l’amour avec moi ?

— Je ne pense pas, mais si ça peut te rassurer, explique-lui que tu n’es pas prête pour ça et tu verras sa réaction. J’ai encore mieux, envoie-lui un message maintenant et dis-lui que tu veux bien le voir, mais juste pour vous balader. Si ça peut te rassurer, je peux très bien venir. Ou alors, dis-lui que si c’est pour coucher avec toi, c’est non. Soit il te répond que ce n’est pas ça, ou bien il ne te répond pas et tu seras fixée.

— Tu crois ?

— Oui, dit-elle en me tendant mon portable.

J’hésite, puis je finis par écrire un message.

« Bonsoir, Claude. Ça serait avec plaisir.

Mais pour qu’il n’y ait pas de malentendus

entre nous, j’accepte de te voir seulement

si ce n’est pas pour me mettre dans ton lit. »

Et pour dédramatiser le texto, j’ajoute un smiley clin d’œil !

— Je n’aurais pas dit autre chose, m’avoue Marion.

Mon portable émet un bip après quelques secondes à peine.

« Bonsoir. Je te rassure tout de suite. Ce n’est pas dans mes habitudes de voir une femme et de la mettre dans mon lit. On peut très bien aller se balader quelque part. Si ça peut te rassurer, tu peux venir accompagnée par ton amie. Ça ne me dérange pas. »

— Voilà tu as ta réponse.

— Mais s’il a dit ça juste pour que j’accepte de le revoir ?

— Sabine, il propose même que je vienne avec vous. Si vraiment, tu as peur, je viens avec toi. Je resterai jusqu’à ce que tu te sentes à l’aise avec lui. Est-ce que ça te va ?

J’acquiesce avec un demi-sourire.

— Bien, envoie-lui ta réponse. Donne-lui rendez-vous au vallon du Stang Alar.

— Où c’est ?

— Je te montrerai le chemin.

« On peut se voir au Stang Alar demain à

14 heures. Je serai avec Marion. »

Je reçois sa réponse assez vite.

« C’est noté. Il n’y a aucun souci. À demain, Sabine. »

— Voilà, c’est fait. Contente ?

— Je le serai quand je te laisserai seule avec lui.

— Tu n’as pas intérêt à me lâcher.

— Crois-moi, c’est même toi qui vas me demander de partir !

Alors que nous allons dans nos chambres, Marion me dit doucement :

— Merci de m’avoir raconté ton histoire. Je sais que tu l’as fait, car je t’ai quand même forcée.

— J’aurai fini par t’en parler et ça m’a fait du bien, finalement.

— Je sais. À demain.

— À demain. Dors bien.

— Toi aussi, rêve de Claude !

— Je ne pense pas que je vais rêver de lui. J’ai d’autres soucis en tête.

 

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