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Pourquoi la beauté nous touche-t-elle ?

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La beauté est partout et nulle part à la fois, une chimère insaisissable qui nous attire et nous trouble.

Qu’est-ce donc que la beauté ? Une simple question d’apparence physique ? Un reflet de notre âme ? Une construction sociale ? Ou bien une force universelle qui transcende les définitions humaines ?

Dans cet essai, nous explorerons les différentes dimensions de la beauté, de sa nature subjective à ses implications culturelles et philosophiques. En chemin, nous défierons les notions préconçues et embrasserons la complexité de ce mystère fascinant.

La beauté, la séduction, l’attrait… autant de mots que nous utilisons pour décrire ce qui est beau, que ce soit de manière générale ou spécifiquement pour décrire une femme belle, voire un homme beau. Mais pourquoi sommes-nous attirés par la beauté ? Pourquoi la beauté nous intrigue-t-elle et nous perturbe-t-elle ?

Certains affirment que la femme cherche à séduire l’homme, à lui tendre des pièges. Plus récemment, la psychologie évolutionniste a avancé que l’attirance de l’homme pour la beauté de la femme est motivée par des préférences biologiques. En effet, sa beauté serait un indicateur de sa santé, de sa fertilité et de sa capacité à procréer. De son côté, le champ des études culturelles et sociales soutient que la beauté et l’attention portée à l’apparence sont le fruit d’un long processus de soumission et de conditionnement. Selon cette théorie, les femmes, dans leur état naturel, sans les normes de beauté imposées par le patriarcat, ne se soucieraient pas autant de leur apparence. 

Pourtant, si l’on suppose que ces théories sont exactes, comment expliquer l’intérêt de l’homme pour la beauté absolue, que ce soit dans l’art, les paysages magnifiques, les idées belles ou même la science, qui est elle aussi qualifiée de belle ?

Avant d’entamer cette discussion, il est important de souligner que nous ne cherchons pas à imposer la beauté uniquement aux femmes, ni à promouvoir des normes de beauté spécifiques. Il s’agit simplement de remettre en question les discours qui associent la beauté des femmes ou leurs préférences esthétiques à des concepts de reproduction, ou à des concepts de conditionnement culturel peser sur les matchs comme pense, beaucoup de féministes. Nous cherchons également à comprendre la beauté dans un contexte plus large, qui englobe à la fois les femmes et les hommes. C’est-à-dire l’humanité.

Il est indéniable que la médecine a cherché tout au long de l’histoire à lier la beauté à divers aspects de la santé et à en faire une marchandise.

La beauté reste un aspect physique qui reflète notre nature sexuelle, mais le problème ne réside pas dans cela. Le véritable problème réside dans la réduction de la beauté à une dimension purement sexuelle, comme le fait la psychologie évolutionniste d’un côté, ou dans la réduction de la beauté à une construction culturelle patriarcale répressive, comme le soutiennent certaines théories féministes dans le domaine des études culturelles et sociales. Est-ce que la nature de la beauté et ses critères relèvent d’une question subjective ou objective ? C’est un autre sujet que j’ai déjà abordé dans mon explication de la théorie de Kant sur la beauté, que je considère comme apportant une réponse objective à cette question. Pour l’instant, nous allons plutôt nous intéresser à la relation entre l’homme et la beauté. Pourquoi la beauté nous touche-t-elle ? Pourquoi sommes-nous attirés par elle ? Que se passe-t-il en nous lorsque nous contemplons quelque chose de beau ?

Depuis l’avènement de la civilisation, l’homme poursuit le bonheur comme s’il s’agissait d’un précieux trésor qu’il ne cesse de chercher et de perdre à nouveau. Au milieu du stress et du déracinement, entre les obligations imposées par cette civilisation et ses désirs de rébellion, l’homme s’efforce de calmer ce déracinement et d’atténuer sa souffrance de diverses manières : sur le plan spirituel, intellectuel et esthétique.

Le désir de beauté a été assimilé, dans l’analyse psychologique, au désir de vivre, à cette impulsion de construire. De même, la laideur a été associée, indépendamment de ses critères, à l’impulsion destructrice. Ces deux pulsions, celle de construction et celle de destruction, sont des forces fondamentales inhérentes à l’être humain, émanant d’une énergie biologique universelle. La pulsion de construction vise à satisfaire les besoins et les désirs de l’âme, englobant non seulement les besoins alimentaires et sexuels, mais aussi les aspirations émotionnelles, notamment le plaisir et le bonheur.

Ce déracinement de soi, que l’homme ressent depuis l’émergence de la civilisation, se manifeste dès les premières étapes de la vie, notamment dans l’enfance, où l’enfant découvre  lui-même à travers, le miroir ou son identité et sa conscience de soi se forment comme une image. En raison de son incapacité à correspondre parfaitement à cette image, cette image comporte des faiblesses, des maladies, des handicaps et des lacunes. C’est ici que la séparation commence et que les désirs commencent à se former pour combler cette lacune et dépasser cette faiblesse et cette séparation. L’enfant cherche alors à trouver d’autres images idéales avec lesquelles il peut correspondre ou se ressembler. Par exemple, pendant sa croissance, la personne se ressemble à de belles images de personnes qu’elle aime, comme l’un des parents ou une image d’un être cher, ou elle se ressemble à de belles images conceptuelles telles que les principes moraux ou les images visuelles esthétiques présentes dans le monde extérieur. Grâce à cette ressemblance avec les belles images qui correspondent aux goûts de la femme ou de l’homme, la lacune est comblée et la douleur est atténuée, et la personne acquiert un sentiment de présence et d’estime de soi, et son narcissisme se nourrit. La personne trouve ce qui le complète dans l’image belle, et ainsi, en présence de la beauté, il est aussi proche que possible du plaisir et de l’extase, et aussi éloigné que possible de l’anxiété, de la peur et de la douleur. L’œil touche indirectement ce sur quoi il regarde, et lorsque la chose est désirable et belle pour l’homme, l’œil interagit avec elle, se fond en elle et se ressemble à elle. Le soi absorbe la chose extérieure belle qui procure une sensation de plaisir, et ce n’est pas l’image en elle-même, mais ce que l’image symbolise dans nos esprits seulement, que ce soit la liberté, l’amour ou d’autres choses que nous pourrions ne pas comprendre, car notre inconscient les comprend et les désire. Une théorie soutient également que l’enfant impose un modèle esthétique à sa vision de la vie, comprenant ce qui est bon et ce qui est mauvais, et ajoute une belle image au bon et une image laide au mauvais. Si nous regardons les anciens mythes et contes de fées, nous constatons que le changement de forme est très courant. Dans les mythes, il est fréquent d’observer des changements de forme. Par exemple, le méchant, initialement laid, peut se transformer en une belle apparence afin de tromper et de communiquer avec les humains. Nous, êtres humains, avons souvent tendance à confondre le beau et le bien en raison de notre culture, considérant tout ce qui est beau comme bon et tout ce qui est bon comme beau. Cependant, cette généralisation est simpliste et erronée, car le beau n’est pas toujours synonyme de perfection. En réalité, il est souvent basé sur une lacune, que nous en soyons conscients ou non. Lorsque nous contemplons une image belle, notre désir se transforme en une autre belle image, sans que la lacune ne soit comblée ou que le désir ne soit entièrement satisfait. Le charme du beau réside souvent dans son aspect insaisissable, qui ne permet pas à l’observateur de le comprendre ou de s’identifier complètement à lui. Malgré cela, le beau exerce toujours une attraction particulière sur nous. Avant de pouvoir apprécier pleinement le charme de la beauté, il est essentiel de comprendre le sentiment d’élévation que nous ressentons lorsque nous contemplons quelque chose de beau. Ce sentiment d’élévation nous permet de nous élever au-delà du monde matériel et familier vers quelque chose d’immateriel. En observant le beau, nous transcendons l’état de manque du monde matériel pour atteindre un état idéal et sans défaut. Ainsi, le beau suscite en nous une interaction et une sensation de protection. Il n’est pas surprenant que notre désir de beauté soit souvent une tentative de compenser des conditions douloureuses et difficiles. En ce qui concerne la dimension sexuelle de la beauté, elle est indéniable et englobe toutes les formes de beauté. Les études psychologiques ont révélé que le désir de beauté et l’appréciation de la beauté satisfont indirectement nos besoins vitaux. Toutefois, avec l’émergence de la civilisation et de la culture, ces besoins vitaux se sont transformés en des besoins émotionnels profonds, remplaçant ainsi leur aspect purement sexuel. Par conséquent, les affirmations de la psychologie évolutionniste qui associent la beauté des femmes à leur capacité de reproduction de manière exagérée ne sont pas précises et négligent la dimension psychologique de l’être humain ainsi que nos besoins émotionnels essentiels que la beauté nous aide à combler. Les études culturelles féministes qui remettent en question les normes de beauté masculines et bourgeoises sont également justifiées, car le corps des femmes a été historiquement maltraité et exploité en imposant des normes de beauté nuisibles pour des raisons politiques, économiques et de contrôle de la mémoire collective. Il est cependant important de faire la distinction entre les normes de beauté imposées de l’extérieur et le désir de beauté qui émane de l’intérieur.

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